Qui sont vraiment les privilégiés ? Telle était la question que posait "Questions directes" à laquelle Monique Pinçon-Charlot était invitée, contactée dès le 1er mars par un journaliste de la société de production « Maximal Production », propriété du groupe Lagardère (Europe 1, le Journal du Dimanche, Paris-Match) qui produit notamment « C dans l’air » (France 5) et ce nouveau direct de France 2 :
"Cette émission, précise son interlocuteur dans un mail, permet de mettre au premier plan un véritable débat de service public sur des sujets sociétaux... Je le précise vraiment, cette problématique sera traitée de manière constructive, c’est la vocation de notre programme de service public. J’aimerais vous convier sur l’une des trois parties de cette émission, sur celle qui s’intéressera à la solidarité nationale et au rapport entre les personnes aisées et les personnes en situation de précarité. Il est important pour nous que votre voix, compte tenu de votre parcours, soit représentée dans notre magazine, vous êtes la personne indispensable sur ce sujet. "
Toutefois « Maximal production » étant la société productrice de cette émission et appartenant à Lagardère l’un des oligarques qui contrôlent 90 % des médias dominants français ces nobles intentions exigent d'être vérifiées.
Finalement le débat devient : « Les riches sont-ils égoïstes ? Sont-ils de mauvais Français ? » puis "La France est elle un pays d'assistés"
Le pluralisme des experts .
Éric Brunet, en 2013 a publié Sauve-qui-peut. dans lequel il enjoint aux riches de quitter une France passée en 2012 à gauche sous la dictature prolétarienne de Hollande.
Jean-Philippe Delsol est un avocat fiscaliste qui a publié un livre en 2013, Pourquoi je vais quitter la France, et un autre, en collaboration, en 2015, Anti-Piketty, vive le capital au XXIe siècle !
Robin Riveton est un "économiste" qui déclare avec arrogance « Au-delà des théories marxistes, il y a des réalités économiques qui ne se discutent pas
L'animateur très partial doit être compté parmi les défenseurs du profit.
Monique Pinçon Charlot et Besancenot (parti en cous d'émission) arrachent des temps de parole contestés mais aucun débat ne peut s'instaurer.
Des « témoins » triés sur le volet
Isabelle Maurer est une chômeuse de longue durée qui a l’habitude des plateaux depuis qu’elle a interpellé Jean-François Copé, lors d’une émission politique sur France 2, en tant que membre du Mouvement national des chômeurs et précaires. Elle est en colère « contre le jeune homme d’en face (il s’agit de Robin Rivaton), car les inégalités se creusent, je ne vis qu’avec 480 € de RSA par mois et 260 € d’APL" ce qui peut passer pour une révolte .. Mais elle ajoute aussitôt " dans tous vos chiffres, il n’y a pas le bonheur ! l’argent n’est finalement qu’une question secondaire ! Elle recommande« d’être gentil avec les patrons et tout s’arrangera » ? …
Jean-Marc Mormeck, ancien boxeur d’origine antillaise, est aujourd’hui délégué interministériel à l’égalité des chances des Français d’outre-mer dans le gouvernement d’Emmanuel Macron. Ce boxeur a grandi dans une cité défavorisée de Bobigny en Seine-Saint-Denis. Il a parfaitement intégré les slogans de La République en Marche : « Il faut se prendre en main, et ne pas attendre qu’on vous donne. Moi j’ai travaillé, j’ai entrepris et j’ai fait du sport ».
Michel Deschamps est un " fils d’ouvrier" devenu restructurateur d’hypermarchés avec 350 licenciements à son actif , donc fabricant de chômage.Mal récompensé de ces efforts il vit aujourd’hui du RSA avec 480 € par mois et refuse d’être traité d’assisté. Comme témoin "ouvrier" on a fait mieux.
Karine Taupin, une agricultrice de 45 ans dont l’exploitation agricole familiale a été mise en redressement judiciaire et qui vit aujourd’hui avec le RSA après avoir travaillé sans répit en restera au niveau de l’émotion et ignorera l’analyse des causes et des mécanismes de la déshumanisation, voire de l’esclavagisation des agriculteurs qui doivent faire face à la chute du cours de la viande, à la crise du lait, au poids des intermédiaires dans la grande distribution.
. Le sociologue Serge Paugam, spécialiste de la pauvreté, précisera à bon escient que la stigmatisation des plus démunis comme responsables des déficits publics en vient à ce qu’ils renoncent à faire valoir leurs droits. Ce qui représente 5 milliards d’euros de bonus par an pour les caisses de l’État !
Francis Richard un riche exilé fiscal déclare « Le principe de redistribution n’est pas seulement injuste, mais immoral. On prend à certains qui se sont fatigués à avoir de l’argent pour le donner à d’autres, à des assistés… Faut-il se faire tuer ? En France on n’aime pas les riches, comme je ne suis pas un héros je suis parti.
Jean-Louis Fiori, jeune retraité de la Poste dénonce le fait que ce service public après avoir touché 500 millions d’euros au titre du CICE initié par Emmanuel Macron, alors secrétaire général adjoint à l’Élysée, chargé de l’économie, pour favoriser la création d’emplois, a licencié 5000 salariés. Curieusement son origine modeste lui est contestée, il a eu le tort de rester dans le camp des exploités
Autopsie d'un débat non pluraliste
Le fractionnement des temps de parole et les divers reportages et témoignages empêchent à la fois le développement de toute analyse et assure la pseudo-objectivité de l’émission. Pierre Bourdieu, le disait, la télé instrument de communication, est un instrument de censure (elle cache en montrant) ". ]l’illusion du pluralisme passe par la multiplication des invités aux points de vue opposés – du moins en apparence – pour attester du caractère démocratique de l’émission. En réalité, par l’excès d’invités, il s’agit d’arriver à faire passer l’analyse scientifique pour une opinion comme une autre. Ce qui lui fait perdre sa charge critique. Il n’y a plus de propos plus scientifiquement fondé que les autres, tout est équivalent. Les effets des injustices sociales et économiques sont commentés mais sans jamais pouvoir mettre en évidence leurs causes.
la « démocratie » et le « pluralisme » sont invoqués avec des intentions explicites de manipuler et de configurer les opinions des téléspectateurs. L’appauvrissement de la pensée qui en résulte contribue à salir, à amoindrir le téléspectateur et à aggraver son asservissement à un monde où tout est ramené au profit et dans lequel ce qui est humain n’a plus comme critère les valeurs de la solidarité et de l’égalité.
Le résultat n'est pas à la hauteur des efforts de Macron
Ce plateau aux petits oignons n'a pas convaincu les Français puisque les sondages réalisés pour cette émission donnent 70 % de Français choqués par les exilés fiscaux, 75 % qui considèrent que les riches ne participent pas à la solidarité nationale, 84 % qui pensent que les inégalités sont excessives».
Quand on vous dit que l'hégémonie n'est plus ce qu'elle était.
D'après le site de Monique Pinçon Charlot