Reuters écrit «L'isolationnisme américain fait naître des doutes quant au statut du dollar en tant que monnaie de réserve mondiale». L'«isolationnisme américain», en l'occurrence, est un simple euphémisme pour désigner «la politique du Président américain actuel». L'un des principaux médias de masse de la planète parle des risques pour la monnaie américaine en utilisant les mêmes termes que les représentants russes officiels, qui indiquent que l'usage du statut du dollar en tant qu'arme politique sapera inéluctablement ce statut particulier. Si même le très mesuré gouvernement allemand, via son ministre des Affaires étrangères Heiko Maas, évoque déjà la nécessité de créer une infrastructure financière mondiale (y compris des analogues du système SWIFT et du FMI) contournant le système financier américain (et donc le dollar), force est de constater que le processus a démarré.
L'article de Charles Wallace pour le magazine Forbes va encore plus loin, et porte un message intéressant: «Le ministre russe des Affaires étrangères a déclaré que les pays qui étaient confrontés aux sanctions, c'est-à-dire l'Iran, la Turquie et la Russie, pourraient commencer à utiliser leurs propres monnaies pour le commerce international, en insinuant que les jours du dollar en tant que monnaie de réserve internationale étaient comptés. Probablement personne n'en serait plus heureux que Donald Trump.» Trump et ses partisans pensent qu'une telle vision est une bêtise impardonnable. Car une telle configuration entraîne des conséquences difficiles à pallier et très lourdes: il devient défavorable pour les USA de produire autre chose que le dollar, les emplois quittent l'Amérique, alors que les pays-vainqueurs intelligents échangent massivement les dollars obtenus contre les technologies et les ressources importantes. Le cauchemar de Trump et de ses partisans est un scénario où il ne resterait plus de l'économie américaine qu'une grande planche à billets.
La situation est donc paradoxale. Trump serait en quelque sorte marxiste sans le savoir. Il aurait compris que faire produire la richesse ailleurs est catastrophique à terme pour le capitalisme rentier. Mais il est le fruit de ce capitalisme rentier qu'il combat. Pour changer il a besoin de ceux qui en tirent profit . Et il n'a pas compris que sans le dollar international il ne pourrait rien financer. Comme c'est impossible, il ne peut qu'échouer. C'était déjà la problématique de Louis XVI. Nous aurions tort de ne pas réfléchir à ces visions intéressantes.
HA